Essoméric : Un Prince Indien à Courtonne

Âgé d’environ 15 ans, il fut ramené en France par le Capitaine Binot Paulmier dit le capitaine de Gonneville, capitaine du navire “Espoir” de 120 tonneaux. Ce gentilhomme était parti de Honfleur le 24 juin 1503, pour les Indes Orientales et il fut jeté aux côtes des Terres Australes. Il abordait une terre inconnue sur la côte du Brésil à l’embouchure de la rivière San-Francisco do Sul, à la latitude du 26ème parallèle et au sud de la ville actuelle de Santos. Cette terre inconnue était habitée par la tribu indienne des Caijos dont le chef était le roi Arosca. Il fut très bien accueilli et séjourna là près de six mois. Arosca lui confia un de ses fils nommé Essoméric, pour le faire instruire de notre artillerie et de mille autres choses qu’il admirait en nous. Gonneville s’obligea de le ramener dans vingt lunes (20 mois),quitta le Brésil le 3 juillet 1504 et fit baptiser Essoméric alors qu’il était en péril de mort le 14 septembre 1504 au large des côtes du Brésil. Il fut son parrain et lui donna son nom. Arrivé en vue des côtes de France, le navire Espoir fut attaqué par les pirates et fit naufrage sur les côtes du Cotentin, en face de Jersey le 7 mai 1505. Essoméric ne put jamais retourner au Brésil, il vécut en Normandie , fut instruit de la religion Chrétienne et adopté par son protecteur et parrain, dont il prit le nom et qui le maria à une de ses nièces

Au XVIIème siècle , l’Abbé Paulmier de Courtonne, chanoine de la cathédrale de Lisieux ( personnage important, fréquentant à la fois la cour du Roi et le Vatican) relate dans un mémoire la curieuse aventure de son arrière grand-père, un indien nommé “Essomèriq….”
Un indien en Normandie, à cette époque, ce n’est pas banal. D’où venait-il ? Qui a pu le ramener en France ? En consultant son mémoire, on peut constater que l’Abbé Paulmier tient ses informations d’un écrit racontant l’incroyable voyage du sieur Binot Paumier de Gonneville.
Qui est le Sieur Binot Paulmier de Gonneville
Originaire de Gonneville, un petit village de 3 lieues de Honfleur ( Calvados), ce marin-commerçant normand rêve comme beaucoup de ses compatriotes d’aller chercher fortune en Orient.A la fin du XVème siècle, et au début du XVIème siècle, la France s’intéresse t à la découverte des terres nouvelles. De plus, au début du XVIème siècle, le commerce est surtout tributaire de la navigation . Les normands jouissent d’une bonne réputation de marins et marchands. La circulation des navires s’intensifient sans cesse entre Dieppe, Honfleur, Granville et Lisbonne, surtout depuis que le célèbre navigateur portugais “Vasco de Gama” a découvert la route des Indes et fondé, lors d’une seconde expédition en 1502 des comptoirs portugais africains ( Sofa, Mozambique) A cette époque, les richesses orientales ( épices, étoffes précieuses et objets rares….) sont très recherchés.
Le Départ

Benoit Paulmier de Gonneville, mettant tous les atouts de son côté recrute à Lisbonne 2 pilotes portugais capables de reprendre le chemin tracé par Vasco de Gama. Une compagnie de commerçants de Honfleur lui confie un navire de 120 tonneaux “L’Espoir”. Il part le 24 juin 1503 de Honfleur.

 

Cap à l’ouest pour chercher fortune
Le début du voyage se déroule sous des cieux cléments, mais bientôt une effroyable tempête modifie les plans. Après plusieurs jours d’errance et d’angoisse pour lui et son équipage, il entre dans une zone calme, navigant vers le sud. La vigie aperçoit enfin une terre. Il sait qu’il est dans l’hémisphère sud. Mais où ?

Accostage en terre inconnue
Gonneville atteint en janvier 1504 , cette terre inconnue. qu’il va baptiser “Indes Méridionales”. Le climat semble agréable, le gibier abondant. La région semble peu peuplée, mais Gonneville et son équipage vont réussir à nouer avec les indiens des relations pacifiques. Il les décrit comme des gens simples, vivant de pêche, chasse et cueillette. Les hommes à demi-nus ont des cheveux longs et la tête coiffée de plumes.
Durant 6 mois, les Normands explorent cette nature vierge, inventorient plantes et animaux. Ils y découvrent un bois “Pau brasil” ou “bois de braise” dont la couleur rouge du tronc sous l’écorce sert à la teinture des tissus.
Retour vers la France de Gonneville
Les normands profitent de l’occasion offerte pour commercer avec les Indiens. Ils chargent et remplissent les cales de ce fameux bois braisé Ils y ajoutent des perroquets de toutes les couleurs et diverses autres marchandises….
Le 3 juillet 1504 “l’Espoir” appareille pour regagner la France. Deux hôtes particuliers sont du voyage : Essomeric ( fils du chef de la tribu et le jeune Namoua, un autre indien ) Ils accompagnent les normands, mais avec la promesse de revenir dès le prochain voyage de Gonneville.
Les pirates attaquent
Ce voyage de retour va être catastrophique : des fièvres font mourir plusieurs membres de l’équipage, notamment le jeune “Namoa”. Continuant, tant bien que mal ce pénible voyage, au large de Jersey, “L’espoir” reçoit une visite plutôt désagréable. En effet, Gonneville et ses compagnons vont subir une attaque d’un pirate anglais “Edouard Blunth” qui vole toute la cargaison ainsi que le journal de bord.
De retour en Normandie
Gonneville n’ayant ramené de son expédition aucune des richesses escomptées, ses commanditaires refusent de lui accorder de nouveaux crédits. Il n’y aura plus de voyage pour lui vers les Indes Méridionales ( Brésil). Gonneville , en homme de coeur va adopter le jeune indien (Essomèriq) lui donner une éducation européenne , le marier à l’une de ses parentes ( Marie Paulmier) et en faire son légataire universel. Essomèricq deviendra Seigneur, fera souche en Vallée d’auge. Il aura de nombreux enfants et il vivra jusqu’en 1583. L’adoption d’Essomèricq est un geste qui montre une belle largeur d’esprit ( c’est donc un descendant direct l’Abbé Paumier qui, vers 1750 , fera connaître cette incroyable histoire).
Quelle terre avait donc atteint Gonneville ?
Il semble qu’il a en réalité abordé une terre nommée BRÉSIL (le nom vient de ce bois rouge particulier appelé bois braisé), évidemment rien à voir avec les Indes méridionales. Ses escales ont pu être identifiées. En affirmant l’existence d’un 3ème monde, le voyage a fait fantasmer bien des esprits. En 1869, le géographe et historien Armand d’Avezac, s’appuyant sur ces documents situe le point de chute de Gonneville au niveau de Santa Catarina ( Brésil). De nombreux aventuriers ont cherché pendant des décennies les fameuses terres de Gonneville. Ils sont parvenus aux mêmes conclusions……
Les écrits de l’Abbé Paulmier
Ces écrits ont été retrouvés dans la bibliothèque de l’Arsenal de Paris. Concernant ce mémoire Madame Leyla Perrone-Moises, auteur d’un ouvrage sur Gonneville affirme “Qu’il s’agissait d’une copie certifiée par les notaires dans le cadre d’un procès sur le droit d’aubaine ( impôt payé par les étrangers)”.
La polémique
Un tel périple, une telle épopée ne peut faire l’économie d’une polémique. Un historien rouennais Jacques Levêque de Pontharouart contesta vivement ce voyage le qualifiant de (voyage imaginaire) Branle-bas de combat au sein de la société de l’Histoire de la Normandie. Monsieur Jean-Pierre Chaline, (professeur de la Sorbonne , Michel Mollat du Jourdin et Mme Leyla Perrone-Moises (originaire de Saô-Paulo, professeur de littérature et écrivaine) démontrent vivement le manque de pertinence de cette thèse……

Contestation

Les affirmations de Monsieur de Pontharouart ont été contestées dès le 18 mai 1993 dans une lettre adressée au journal “Paris-Normandie” par Monsieur Jean-Pierre Chaline, président de la Société de l’Histoire de Normandie.

Conclusion
Cette belle histoire fit le bonheur des historiens normands (jusqu’à cette belle polémique en 1993) En attendant il est doux de rêver à cette formidable aventure, en se promenant, au cœur de Honfleur sur le quai ” Le Paulmier”. Il faut aussi rappeler que la Normandie a commercé avec le Brésil dès le XVIème siècle. (Ce bois braisé était considéré comme bois précieux. Il a notamment donné sa couleur aux toiles des frères Gobelins).

L’Histoire d’Issoméric racontée dans le livre “Mon village”

Préambule
Ce texte est extrait du livre “Mon Village” de Jacques Auzoux, maire de Courtonne la Meurdrac de 1977 à 1989.
Il faut noter que Monsieur Auzoux est le seul à orthographier Issoméric de cette façon. Nous n’avons retrouvé aucune trace de cette orthographe alors que l’on peut trouver le nom de cet Indien écrit Essoméricq ou Essoméric.

Histoire d’Issoméric authentique prince indien
L’extraordinaire aventure du prince indien Issoméric qui naquit au Brésil et fut enterré peut-être à Courtonne-la-Meurdrac.

Trois sources d’informations pour étayer ce récit :

1) Une documentation en provenance du Brésil ;
2) Une étude détaillée de Monsieur d’Avezac sur l’Abbé Jean Paulmier de Courtonne-la-Meurdrac, arrière petit-fils de l’indien Issoméric ;
3) Des extraits du Bulletin de la Société historique de Lisieux (année 1900) et la collaboration dans le domaine de ces recherches de trois amies de la commune (nous les remercions au passage).
Toutes les histoires, qu’elles soient authentiques ou de pure imagination, et nous ne ferons pas exception à la règle, commencent toujours ainsi : «Il était une fois…»

Un jour de septembre 1981, dans le courrier adressé au maire de Courtonne-la-Meurdrac, se trouve une lettre en provenance du Brésil, plus exactement de Sao-Paulo, datée du 6 septembre 1981, en voici le contenu :

«Monsieur le Maire, je vous serai très obligé de m’informer s’il existe quelques personnes érudites qui pourraient me donner des renseignements pour une recherche que je suis en train de faire. Dans un livre que mon grand-père a écrit (c’est toujours mon correspondant qui parle), il signale que l’Indien Issoméric que Robert de Gonneville avait ramené du Brésil en 1504 a été enterré à Courtonne-la-Meurdrac, étant donné l’importance historique de ce navigateur qui a été le premier à aborder les côtes du Brésil, je suis intéressé à savoir s’il existe quelques références sur ce passage historique dans vos archives. Dans l’attente de vous lire, recevez monsieur le Maire, etc.»

Qu’allons-nous faire avec cet Indien qui nous tombe des nues ? De toute façon il faut répondre à ce Monsieur, la politesse l’exige, mais lui répondre quoi ? Que nous accusons réception de sa lettre du tant ?

Que nous sommes étonnés que cet illustre Indien repose peut-être dans notre cimetière ? Que nous avons compulsé nos archives et résultat, pas de traces d’Indien marié ou décédé dans notre Commune, et terminer cette lettre par la formule habituelle : «Désolé, Monsieur, Veuillez agréer, etc.»

Ce Monsieur attend autre chose de nous c’est évident ! Eh bien allons-y, embarquons-nous dans cette aventure, dans cette sorte d’association de recherches au-delà des mers. Ce mystère entourant la vie de ce prince indien, cette énigme pourrait-on dire. Comment est-il arrivé en France ? Et encore plus curieusement peut-être à Courtonne? La curiosité aidant, et la passion pour tout ce qui touche au passé de notre village nous renforce dans notre décision.

Avec vous, chers amis, nous allons entreprendre un grand voyage… Maigres renseignements au départ, arrivée de cet Indien en France vers 1504, décédé probablement à Courtonne-la-Meurdrac ?

Premier contact — Les Archives départementales du Calvados.

Issoméric a existé, une étude d’Émile Boissais, avocat à la Cour d’Appel de Caen le prouve «Issoméric mourut en 1583 âgé d’au moins 95 ans, nous inclinerions à fixer le lieu de son décès à Courtonne-la-Meurdrac, la seigneurerie de Courtonne appartenant à son fils aîné».

Pas de traces d’Issoméric dans nos archives communales, c’est très simple nos archives partent de 1585 et il est mort en 1583.

Deuxième contact — Les Archives départementales de la Manche.

Issoméric a existé, c’était même un chaud lapin, comme on dit chez nous. Voici un extrait : «Binot Paulmier dit le Capitaine de Gonneville, marie en 1521 son fils adoptif Issoméric, fils du Roi Arosca, à sa nièce Marie Moulin (nous y reviendrons), de ce premier mariage il naquit 14 enfants, nous apprenons qu’il se marie une seconde fois, et sa seconde épouse lui donne 7 filles dont la postérité est inconnue. De son premier mariage en 1521, il eut des fils, nous remontons jusqu’au VIe degré qui nous conduit vers 1785, il y eut beaucoup de chanoine dans cette lignée.

Revenons à notre correspondant brésilien. Nous lui transmettons quelques renseignements. Deux mois s’écoulent, la machine est en route, la courroie de transmission fonctionne et une seconde lettre arrive en Mairie suivie d’une troisième. Le but de notre correspondant et le nôtre est de savoir si cet Indien est enterré soit dans l’Église (c’était un noble) ou dans le cimetière de Courtonne, dans cette troisième missive notre correspondant nous dit qu’il vient de recevoir de la bibliothèque de Honfleur la copie d’un ouvrage qui mentionne que l’Indien Issoméric a été probablement enterré à Courtonne-la-Meurdrac ainsi que ses descendants directs sont nés et ont résidé dans le château de ce lieu.

Donc pas d’erreur, Honfleur et Binot Paulmier dit le Capitaine de Gonneville, point de départ de cette histoire vraie : «Trois chanoines de Lisieux issus d’un Roi Indien.»

Ces Paulmiers de Courtonne. — Dix années s’étaient écoulées depuis la découverte de l’Amérique, le xvie siècle venait de s’ouvrir, on était en 1503.

Un hardi marin honfleurais, Binot Paulmier ou Le Paulmier, d’une branche de cette famille établie dans la paroisse de Gonneville-lesHonfleur et dont le nom devait passer à la postérité sous le nom de «Capitaine Gonneville» (Vues les belles richesses d’épiceries et autres raretés apportées par les navires portugalloises allant es Indes) résolut, lui aussi, d’aller tenter la fortune par-delà les mers.

Il fit part de son projet à huit autres «honorables, hommes Bourgeois de Honfleur, qui eux neuf à fraiz et constements communs, équipèrent un navire du pors de six-vingt-tonneaux (120) peu moins, dite L’Espoir, qui n’avait jamais servy qu’à faire un voyage au Hambourg».

Soixante-deux personnes, y compris le Capitaine, prirent place sur ce bâtiment qui quitta Honfleur le 24 juin 1503. Après avoir niché aux Canaries, au cap Vert et franchi l’Équateur, les navigateurs normands abordèrent enfin à une terre inconnue et leur Capitaine conduisit «La navire dans une rivière qu’elle avait trouvée, qu’est quasiment : comme celle de l’Orne».

Ils nommèrent leur découverte : «La Terre de Gonneville

L’apparition d’issoméric

Le récit nous introduit alors dans ce nouveau pays dont il nous montre les sites, les productions, les habitants, et ces descriptions se rapportent absolument à ce que les autres voyageurs de cette époque disent du Brésil. C’était donc là que les hasards de la mer avaient porté le Capitaine Gonneville et ses compagnons.

Le roi des Indiens s’appelait Arosca «comme il semblait âgé de soixante ans, lors veuf et avait six garçons, depuis trente jusqu’à quinze ans et venait et ses enfants souvent à la navire. Homme de grave maintien, moyenne stature, grosset et regard autif».

Parfaitement reçus par ces Indiens, les Normands demeurèrent quelque temps dans ce pays, et le jour de Pâques 1504 y plantèrent une croix sur le rivage avec cette inscription :

Hic sacra Palmarius posuit Gonivilla Binotus Grex socius pariter. Neustraque progénis…

Durant ce voyage le scorbut a fait 6 morts parmi les marins. Le navire faisait eau de toutes parts, il fallait le reconstruire presque en entier, on trouva sur place les matériaux nécessaires, avec le concours des Indiens, gens simples vivant de chasse, de pêche, des produits de la terre, habillement sommaire, arcs, flèches, épieux en bois pointus et durcis au feu, cabanes couvertes de branchages de feuilles et d’herbes, nattes douces pleines de feuilles et de plumes couvertes de peaux, ustensiles en bois.

Le séjour dura 6 mois environ, le bateau avait été réparé, le retour en France fut décidé «Et fut tant fait par beau temps semblant que : le dit Seigneur Arosca (bien qu’un sieur jeune fils qui d’ordinaire (tenait bon) avec ceux de la navire vint en chrestienneté parce qu’on promettait aux père et fils le ramener dans vingt lunes au plus tard».

En langage clair, suivant la coutume on désirait ramener en France quelques-uns des habitants de la nouvelle terre. Le Capitaine avait remarqué Issoméric, le plus jeune fils d’Arosca, on lui offrit d’embarquer sur la promesse de le ramener dans 20 lunes, c’est-à-dire environ 20 mois plus tard et de lui apprendre l’Artillerie pour pouvoir maîtriser les ennemis voisins. Un Indien d’âge mûr nommé Namoa fut donné comme mentor au jeune prince et le 3 juillet 1504 on mit la voile. Voyage de retour très pénible jusqu’au 10 octobre on ne revit pas la terre, la fièvre maligne emporta 4 passagers dont Namoa.

Issoméric étant tombé malade à son tour fut baptisé «Le dict baptème servit de médecine à l’âme et au corps parce que d’empuis le dict Indien fut mieux» et furent ses parrains, le dit Gonneville capitaine et Anthoine Thierry et au lieu de marraine fut pris Audrien de La Marc pour tiers parrain et Issoméric fut nommé Binot du nom de baptême du Capitaine Binot Le Paulmier dit Gonneville. Ce voyage de retour fut semé d’embûches, on tomba sur des peuplades sauvages anthropophages «Mids comme venant du ventre de la mère» (On suppose qu’ils étaient nus).

Les premiers marins descendus à terre furent tués, les navigateurs remontèrent la côte sur une distance d’au moins 100 lieues et tombèrent encore sur des Indiens farouches, mais ils se tenaient sur leurs gardes et firent le plein du navire. Vers le 1er janvier abordent dans une terre inhabitée, 5 semaines après repassent l’Équateur, se trouvent aux Açores, ravitaillement en vivres frais, repartent le 9 mars pour l’ Europe, tempêtes, abordent en Irlande pour radouber la coque du navire, séjour d’une durée inconnue, puis cap sur Honfleur.

Le 7 mai 1505, un forban anglais, Edouard Blunth de Plymouth, les attendait entre Guernesey et Jersey, il leur donna la chasse, Gonneville se défendit vaillamment avec son équipage décimé par les maladies et il eut raison de ses agresseurs si un autre forban Mouris Fortin, Malouin, ne s’était joint à l’Anglais. Les Honfleurais durent se jeter à la côte après avoir perdu 12 hommes, 4 moururent à terre de leurs blessures. Le navire était perdu avec son contenu, 28 personnes restèrent avec le capitaine et Issoméric ne revit jamais sa patrie, son parrain en l’adoptant l’avait marié en 1521 à sa nièce Marie Moulin (une autre version indique qu’en 1521 il épousa Suzanne Paulmier, parente, certains même disent fille de son bienfaiteur et celui-ci lui laissa à la fois et sa fortune et son nom. Nous inclinons à penser que ce fut Marie Moulin son épouse, nos informations brésiliennes sont précises à ce sujet).

Toujours est-il que, grâce à cette adoption, il est devenu un second Binot Paulmier. Du mariage d’Issoméric avec Marie Moulin naquirent 14 enfants, nous n’en connaissons que deux : Binot Paulmier, le deuxième du nom et Olivier, le neuvième par ordre de naissance. Issoméric devenu veuf, se remaria dans un âge avancé et n’eut de sa seconde union que des filles dont on ignore le nom et la postérité. Le lieu du décès d’Issoméric ou Binot Le Paulmier est peut-être Courtonne-la-Meurdrac dont la seigneurie appartenait à son fils aîné, lequel habitait le château de Courtonne, marié à Jeanne Robillard, là naquirent les enfants de ce dernier notamment en 1565 J. -B. Paulmier, futur président des Trésoreries de France en Provence, décéda à Marseille en 1619. Issoméric décéda en 1583 vers l’âge de 95 ans.

Olivier Paulmier, sieur de Courtonne et de Pommeret, septième des enfants issus du mariage de Binot II Paulmier avec Jeanne de Robillard, épouse en 1627 Marie Collet des Boves, issue d’une ancienne famille qui habitait Le Mesnil-Simon, le contrat fut déposé devant les tabellions de Lisieux le 13 novembre 1654, le mari y est qualifié de «Noble Homme», conseiller du Roi et receveur des tailles à Lisieux, il avait donc renoncé à la profession des armes. Effectivement après de longues et patientes recherches dans nos archives (Registres d’état civil de 1604 à 1634) dans un vieux français presque illisible, nous trouvons trace du fils d’Issoméric, Olivier Paulmier a bien habité à Courtonne, il figure bien dans nos registres à la date de 1627, notre patience est récompensée.

Cet Olivier eut 5 enfants : Jean-Baptiste qui fut chanoine ; Gabriel, officier de Mademoiselle de Montpensier, nièce de Louis XIII; Robert, sous-diacre, mourut à Courtonne en 1701; Marie épousa Charles des Nollières de Laumondière; et Hélène qui resta célibataire. Nous trouvons dans nos registres en date de janvier 1691, la signature très lisible d’Hélène Paulmier, marraine de Françoise (illisible), il est écrit ceci: «et la marraine Honorable fille Damoiselle Hélène Paulmier» (Arrière petite-fille d’Issoméric).

Robert-Antoine Paulmier, fils aîné de Gabriel et de Françoise de la Roudière et écuyer de Monsieur Le Prince épousa après dispense de bans du 10 janvier 1720 Marie Senée, veuve de Me Germain Rioult, conseiller du Roi en la paroisse de Saint-Germain de Lisieux, nous ne connaissons de ce mariage qu’une seule fille, Marie-Anne Paulmier, qui épousa le 7 janvier 1743 François d’Ouézy, chevalier, seigneur et patron de la paroisse d’Olendon près Falaise. Le mariage fut célébré par notre, chanoine de Rocques Jean-Baptiste II Paulmier, oncle de la mariée, et les époux habitèrent tantôt Saint-Jacques de Lisieux tantôt Verneusses.

Marie-Anne Paulmier est la dernière du nom des descendants du prince Issoméric en Normandie.

Quelques lignes sur Messire Jean Paulmier de Courtonne, chanoine dès 1658 en l’église cathédrale de Lisieux, résident du roi de Danemark en France, ajoutons qu’en 1664, le chanoine Jean Paulmier, premier du nom, publia un ouvrage intitulé «Mémoire touchant l’établissement d’une mission chrétienne dans le troisième monde appelée autrement la Terre Australe, Méridionale, Antartique, dédiez à N.S.P. le Pape Alexandre VII par un ecclésiastique originaire de cette même terre»

Avant les bombardements de Lisieux, une inscription se lisait encore sur la porte d’une maison de la place Le Hennuyer, maison qui devait être certainement le logis du premier

chanoine Paulmier car elle paraissait dater du règne de Louis XV :

Etiam niger in puritate
Constans. Coronatur.
Ignominia sacerdotès.
Proprius studer.
Divitiis Hero-A-Hero

Les trois dernières lignes en caractères plus petits que les deux autres. C’est probablement le chanoine Paulmier qui a rappelé dans cette sentence l’origine étrangère de sa famille.

Ici se termine l’histoire d’Issomeric, petit prince indien venu de son lointain Brésil et qui repose peut-être dans notre église ou dans notre cimetière.

Ci-dessous, signatures d’un baptême.
La marraine, Honorable fille Damoiselle Hélène Paulmier, arrière petite-fille d’Issoméric et le parrain, noble Grand Homme François Coburne.

Ci-dessous : Traces d’Ollivier Paulmier, fils d’Issoméric.